Nos pensées sont-elles anodines ou alors ont-elles un impact physique sur nous ? C’est ce que les neurologues ont investigué et le résultat est assez incroyable : nos pensées modifient notre cerveau ! Quelles sont les implications d’une telle découverte ? Et que faire de nos pensées ?

 

1. Mes pensées changent mon cerveau…

 
Dans l’article « Peut-on vraiment changer ?« , nous avons vu que notre cerveau est malléable, c’est à dire qu’il est capable de changer. Nous avons vu que grâce à cette malléabilité – appelée la neuroplasticité – nous pouvons changer nos habitudes, nos comportements etc., si nous le désirons.

Mais concrètement, qu’est-ce qui stimule le changement du cerveau ?

Et bien en fait, tout ce que l’on vit modifie la structure de notre cerveau : ce que l’on voit, ce que l’on fait, ce que l’on ressent…. et même ce que l’on pense !

C’est en effet au début des années 90, qu’Alvaro Pascual-Leone, et son équipe, démontrèrent que le simple fait de penser change la structure du cerveau ! [1]
 

1.1. L’expérience scientifique qui a prouvé l’impact de nos pensées sur notre cerveau

Le neurologue Pascual-leone et son équipe prouvèrent l’impact de nos pensées sur notre cerveau en élaborant une expérience musicale… [1]

Le principe de l’expérience est simple :

  • apprendre à des volontaires à jouer une série de mouvements de doigts au piano
  • observer les progrès faits, au fur et à mesure de l’entrainement
  • observer l’impact de cet apprentissage sur la structure du cerveau

Mais il y a une subtilité dans cette expérience : deux groupes sont créés (en plus des groupes contrôle) :

  • Groupe de pratique physique : les volontaires doivent répéter un geste de piano – à 5 doigts – pendant 2h, et cela 5 jours de suite. Leur niveau de pratique, ainsi que l’activité de leur cerveau, sont mesurés au fur et à mesure de l’entrainement. Grâce à leur équipement, l’équipe de chercheurs peut en effet observer, et mesurer, l’activation de l’aire motrice corticale (et plus spécifiquement, la partie du cerveau responsable de la flexion et extension des doigts) avant et après chaque entrainement.
  • Groupe de visualisation mentale : cet autre groupe de volontaires ne doit pas faire le geste de piano physiquement, mais doit tout simplement le visualiser mentalement, sans bouger les doigts… et cela pendant 2h, et 5j de suite aussi. Le cerveau de ces volontaires est lui aussi scanné, avant et après entrainement.


1.2.
Les résultats de l’expérience

Les résultats sont assez époustouflants !

Pour le groupe de pratique physique, le résultat est clair : un élargissement de l’aire motrice corticale est observé après chaque entrainement (à noter : cet effet n’est pas observé chez le groupe contrôle, c’est-à-dire le groupe de volontaires n’ayant fait ni exercice physique, ni exercice mental).

Jusque là rien d’extraordinaire (quoique)… Jusqu’à ce que l’on observe le 2ème groupe.

Le scanner du cerveau du groupe de visualisation mentale montre, en effet, la même modification du cerveau que dans le groupe de pratique physique !

La visualisation mentale d’un geste a donc le même effet sur le cerveau que le geste physique lui-même !
 

1.3. Impact sur la pratique réelle

Mais qu’en est-il au niveau de la pratique réelle du piano ? Cet élargissement cérébral se traduit-il en amélioration pratique, et physique, du geste de piano ?

La réponse est oui! Lorsqu’après 5j de pratique uniquement mentale, le groupe de visualisation a effectué le vrai geste physique, sur un vrai piano, leur pratique s’était en effet améliorée !

Le simple fait de visualiser cette pratique s’est donc traduit en amélioration concrète et physique de la pratique, sans qu’ils n’aient fait les gestes !

A noter que l’amélioration du groupe de visualisation n’était pas aussi bonne que celle du groupe ayant effectué la pratique physique. Néanmoins – et cela est un résultat tout aussi bluffant, d’après moi !! – après seulement 2h de pratique physique supplémentaire, la pratique du groupe de visualisation est devenue égale à celle du groupe de pratique physique !

Incroyable, non ?
 

2. Quelles sont les implications d’une telle découverte?


2.1. Je dois faire attention à ce à quoi je pense!

Si nos pensées modifient notre cerveau…. et bien, comme dirait Pascual Leone (dans la vidéo ci-dessous), il nous faut faire attention à ce à quoi l’on pense!!…

Par exemple, selon que je pense à des choses positives ou négatives, et que je ressens des émotions agréables ou désagréables, et bien je vais activer différentes parties de mon cerveau. Et plus je vais activer ces parties, plus je vais les développer et donc plus je vais développer ma capacité à penser à ces choses là, et à ressentir les émotions associées.

Le neuropsychologue Richard Davidson, de l’université de Wisconsin-Madison, a d’ailleurs démontré que notre tendance à être optimiste, sûr de soi, heureux ou alors pessimiste, triste et soucieux, est liée à quelle partie de notre cortex préfrontal nous activons préférentiellement : les personnes pour qui la partie droite du cortex préfrontal est plus active, et qui contrôlent moins leurs émotions, tendent à être plus tristes, plus pessimistes et méfiants ; par contre, les personnes pour qui le cortex préfrontal gauche est plus dominant, sont plus optimistes et ont plus confiance en eux. [2,3]

Mais que faire donc?… ai-je le contrôle sur mes pensées et sur quelle partie du cerveau j’active et développe ?
 

2.2. Je peux apprendre à me libérer de mes pensées parasites

Encore une fois, grâce à la malléabilité de notre cerveau nous pouvons, en effet, développer différentes parties du cerveau, et cela volontairement. C’est une question d’entrainement, de répétition, et surtout  d’attention. [4]

Car si les pensées des pianistes d’Alavaro Pascual-Leone (de l’experience ci-dessus) ont pu changer leur cerveau du simple fait d’imaginer le mouvement dans leur tête, c’est parce qu’ils y portaient une attention spécifique et répétée : 2h par jour, 5j de suite, leur attention était focalisée sur cette pensée.

De nombreuses recherches ont maintenant montré, en effet, que ce qui change le cerveau est plus que le stimulus externe ou interne (ce que je vois, ressens, pense etc.) : c’est ce sur quoi je porte mon attention. [4,5]

Par exemple, si je fais un mouvement des doigts, mais que mon attention est vraiment focalisée sur la musique que j’écoute, et bien c’est l’aire cérébrale liée à l’audition qui sera activée, et non pas l’aire cérébrale liée au mouvement des doigts.

Donc, plus que l’idée de faire attention à ses pensées, est l’idée qu’il faut faire attention à ce sur quoi je focalise mon attention…

Si, par exemple, je décide, consciemment, de focaliser mon attention sur des choses positives, ou tout du moins constructives, au moins 5 minutes de plus que d’habitude, et cela chaque jour, pendant plusieurs jours, alors je vais pouvoir développer ma capacité à être positif.

Petit pas à petit pas. Puis, je peux passer à 10 min par jour, puis 20 min, puis 1h… Il faut juste y porter une attention particulière et le changement est possible.

2.3. Comment faire concrètement pour me libérer de mes pensées parasites ?

Il est donc possible de développer notre capacité à gérer nos pensées parasites.

La question maintenant est comment faire ? Car c’est bien beau toute cette recherche, mais l’important est de pouvoir le mettre en pratique, non ? 

Ce sujet étant très vaste, j’y ai consacré deux articles : « Comment se libérer de ses pensées parasites – 1ère Partie » et « Comment se libérer de ses pensées parasites – 2ème Partie – trucs & astuces ».

2.3. Attention : ne tombez pas dans le piège…

Avant de conclure, j’aimerai souligner un point important : il est important de prendre la responsabilité de ses pensées… Mais attention à ne pas tomber dans l’extrême « anti-négatif » !

Ce n’est pas parce que nos pensées modifient notre cerveau qu’il faut culpabiliser, ou s’inquiéter, dès qu’une pensée parasite rentre dans notre tête.

D’une part, nos pensées parasites sont souvent là pour une bonne raison, et les prendre en compte peut nous faire évoluer, si on le désire bien-sûr.

D’autre part, parce que le processus du changement du cerveau prend du temps, de la pratique et de l’attention, comme je l’ai souligné plus haut. Dans la majorité des cas, il faut donc beaucoup de répétitions, et une attention consciente et focalisée, pour qu’une pensée s’inscrive à long terme dans notre cerveau. Qu’elle soit positive ou négative.

Cela étant dit, nous verrons donc dans de prochains articles quelques trucs pour se libérer de ses pensées parasites, car un peu c’est bien, mais un peu moins c’est tout de même mieux !
 

3. En savoir plus

 
Si l’expérience d’Alvaro Pascual-Leone vous intéresse, vous pouvez lire cet article scientifique (en anglais, dernier paragraphe p. 379-381), qui explique l’expérience en détail, ou la publication originale : « Modulation of muscle responses evoked by transcranial magnetic stimulation during the acquisition of new fine motor skills« 

Vous pouvez aussi retrouver plus de détails sur le livre de Norman Doidge, dont j’ai déjà parlé ici : « Les étonnants pouvoirs de transformation du cerveau« , p. 346.

Mais encore, si vous préférez les vidéos, alors retrouvez Alvaro Pascual-Leone lui-même expliquant cette expérience à T = 5.50 min de la vidéo ci-dessous :
 

Les étonnants pouvoirs de transformation du… par einstein-rosen-podolsky
Vidéo postée sur DailyMotion par einstein-rosen-podolsky

 
Conclusion


Tout ce que l’on vit modifie la structure de notre cerveau : ce que l’on voit, ce que l’on fait, ce que l’on ressent, voire même ce que l’on pense !
Les neurologues ont en effet montré que le simple fait de visualiser un geste développe la même partie du cerveau que si l’on faisait ce geste physiquement. Les implications d’une telle découverte sont énormes : nous devons prendre la responsabilité de nos pensées si nous voulons contrôler le développement de notre cerveau et de ce qui en découle. Notre vision du monde, nos comportements, nos émotions etc. La bonne nouvelle, c’est que cela est possible. Je peux, si je le désire, changer mes pensées. C’est une question d’entrainement, de pratique mais surtout d’attention. À très bientôt pour le « comment faire » !

Cet article suscite-t-il, chez vous, des questions ou commentaires ? ou alors, avez-vous des informations supplémentaires sur ce sujet, que vous désireriez partager avec les internautes ? Alors, n’hésitez pas à laisser vos commentaires ci-dessous,

Merci et à bientôt !

 

Références

 
[1] – A. Pascual-Leone, N. Dang, L. G. Cohen, J. P. Brasil-Neto, A. Cammarota et M. Hallett, 1995,  « Modulation of muscle responses evoked by transcranial magnetic stimulation during the acquisition of new fine motor skills » Journal of Neurophysiology, 74(3): 1037-45

[2] – S. Klein, « Apprendre à être heureux : neurobiologie du bonheur« , éditions Robert Laffont, 2002, pp. 58-67 et références incluses.

[3] – R. J. Davidson, A. J. Tomarken, J. B. Henriques, 1990, « Resting frontal assymetry predicts affective response to films » Journal of Personal and Social Psychology 59, pp. 791-801, et références incluses.

[4] – « Entrainer votre esprit – Transformer votre cerveau : Comment la science de pointe révèle le potentiel extraordinaire de la neuroplasticité  » Sharon Begley et Marie Blanche Daigneault, Ariane Editions (7 novembre 2008) – Version originale du livre : « Train your mind, Change your brain », pp 156-160 de la version anglaise.

[5] – David Rock, « Your Brain at Work: Strategies for Overcoming Distraction, Regaining Focus, and Working Smarter All Day Long« , HarperBusiness Edition, 2009, pp. 224-227

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